Les mots introduisent des relations auxquelles le silence donne éclat et densité. Deux êtres se regardent. Un homme face à une femme. L'équilibre dépasse les formes, traverse les visages, rejoint les regards. L'univers se résout dans une relation ambiguë que l'artiste traduit. Les corps dressés deviennent des équations et chaque individu se découvre empreint d'une muette géométrie. Chez Thérèse Chotteau, la figure humaine, accidentelle et fugace, se double d'une forme géométrique qui en serait l'ultime transposition. Tout réside dans la relation de l'homme à sa synthèse. Le mystère chiffre le sens.
Même parfait, le nombre n'est rien. Il n'existe qu'en regard de l'Autre, de ce double à rebours qui nous questionne. Nos silences en disent plus long que nos certitudes et le travail de l'homme tient dans un perpétuel questionnement. L'ordre s'installe comme une ample respiration qui simplifierait tout. L'univers devient une équation où chaque être découvre son symétrique sous la barre de fraction que le regard pénètre par effraction. L'espace se dilate, les choses perdent de leur poids et le vide, étoffé de silence, donne à chacun sens et gravité. L'espace, tracé à la hâte sur un carnet, est autant idée que divination. L'artiste prend soin de délimiter le champ dans lequel la magie des relations humaines prendra corps. Espace limité tracé à l'instar de l'antique xtéménos du devin, le blanc du papier se charge d'un destin chiffré. Être présent importe moins que la relation qui se noue avec l'univers qui nous enveloppe. Le chiffre prend corps et s'oublie dans la recherche de l'autre. Une géométrie de l'échange se dessine dans un espace nouveau, épuré et concentré, qui fait de l'infini une promesse de partage.
[Michel Draguet]